10 ans de Mr Irrelevant.

Chaque début d’année, la Draft passionne. Quel joueur notre équipe va sélectionner? Qui va réussir? Quel joueur méconnu va devenir une star en NFL? Cette dernière question s’est de nouveau retrouvée mise en lumière lors de la saison 2022, lorsqu’un certain QB rookie de San Francisco a totalement déjoué les pronostics, en s’imposant comme un titulaire indispensable. Son nom? Brock Purdy. Sa position lors de la Draft? Bon dernier. Le dernier joueur sélectionné est surnommé “Mr. Irrelevant” (traduit comme “non pertinent”, voir “hors sujet”). Cette position regorge de fantasmes. Le joueur est-il vraiment chanceux? A-t-il une vraie chance de réussir? Ou n’est-il qu’une simple anecdote parmi une multitude de choix? Ces dix dernières années de Draft peuvent peut-être nous donner une réponse abstraite, mais d’un point de vue récent. Retraçons l’Histoire des dix derniers Mr. Irrelevant.

2013: TE Justice Cunningham

Cunningham grandit en Caroline du Sud où il débute le football. Au lycée, il est classé comme joueur 3 étoiles et 43ème meilleur TE du pays. Enregistrant seulement trois offres de facs (mais de Power 5), le joueur opte pour rester à la maison du côté de South Carolina. Chez les Gamecocks, Cunningham joue peu. Après quelques apparitions en saison freshman, puis sophomore, le TE se retrouve titulaire à son poste, mais dans l’ombre d’un système s’orientant particulièrement vers la course. De plus, il n’est pas simple d’imposer des statistiques dans les airs quand tes coéquipiers sont Alshon Jeffery et Bruce Ellington. Cunningham vit cependant de bonnes années universitaires, ne connaissant la défaite que quatre fois sur ses deux dernières saisons, et des victoires en Bowl face à Nebraska (Capital One Bowl 2012) et Michigan (Outback Bowl 2013). Son gros physique lui permettant de bloquer (1.91m, 117 kg) lui ouvre les portes de la NFL.

Il est alors sélectionné comme dernier choix de la Draft 2013 par les Indianapolis Colts. L’expérience reste rapide. Après avoir débuté la saison en practice squad, le TE est appelé pour jouer face aux Arizona Cardinals. Il réceptionne un ballon pour 4 yards lors du match… sa seule stat en NFL. Coupé peu de temps après, il trouve une maison du côté de St Louis et des Rams. Il fait partie de l’équipe lors de la transition vers Los Angeles. Pendant presque trois ans s’enchaînent les cuts, appels dans le roster principal, puis retours en practice squad. Septembre 2016 est la dernière fois où l’on verra Cunningham dans une équipe NFL.

Désormais âgé de 32 ans, le récent papa partage sa vie avec une coach de volleyball, et semble se porter à merveille. 

2014: S Lonnie Ballentine

Originaire de Memphis, Ballentine se met au football assez tard, lors de sa dernière année de lycée. Véritable athlète (il pratique également l’athlétisme et le basketball), le longiligne safety sort des stats impressionnantes pour un néophyte dans son sport (45 placages, 6 interceptions, 12 passes déviées). Joueur 3 étoiles et 30ème meilleur safety du pays, le joueur ne trouve pourtant qu’une seule offre, celle de la maison: Memphis. Chez les Tigers, il apparaît régulièrement sur le terrain dès son année freshman, avant de passer définitivement titulaire lorsqu’il passe sophomore. En junior, Ballentine connaît son climax avec 65 placages, 0.5 sack, et 3 interceptions, malgré la mauvaise saison de l’équipe. L’année suivante est moins bonne statistiquement et le safety décide de se présenter pour la Draft NFL, après avoir cumulé 172 placages, et 3 interceptions, en quatre ans dans le Tennessee.

Malgré sa non présence lors du Combine 2013, Ballentine est sélectionné au dernier choix par les Houston Texans, où il signe un contrat de 4 ans et 2.27M$. Mais les galères démarrent pour le joueur. Souvent blessé, il n’est présent que pour deux matchs lors de sa seconde saison, dont un contre les Jaguars où il enregistre 3 placages et 1 passe défendue. Toujours abonné à l’injured reserve le reste du temps, les Houston Texans se séparent définitivement du safety en septembre 2017. 

Lonnie Ballentine n’est actuellement pas présent sur les réseaux sociaux, mais l’ancien Tiger semble donner un coup de main pour entraîner des jeunes joueurs. 

2015: TE Gerald Christian

La carrière de Gerald Christian a bien démarré. Au lycée, du côté de Palm Beach Gardens (Floride), le Tight End réceptionne des ballons d’un certain Jacoby Brissett, et partage le vestiaire avec le safety Matt Elam (1er tour de Draft 2013). Considéré comme le 2ème meilleur TE de la génération 2010, et joueur 4 étoiles, Christian décide de rester dans son Etat natal, et de jouer pour les Florida Gators. Malheureusement, son arrivée coïncide avec celle de Will Muschamp, tout nouvel Head Coach pour l’équipe de Gainesville, qui n’a en conséquence pas recruté le joueur. Après une saison à seulement 3 matchs pour 4 réceptions, 72 yards, et 1 TD, Christian décide de transférer, voyant le peu d’intérêt que lui porte le coach, notamment lors des séances d’entraînement. Direction Louisville et la Big East, entraîné par Charlie Strong. A l’époque, les Cardinals forment une redoutable équipe menée par Teddy Bridgewater, Devante Parker, ou encore Calvin Pryor. Après une première année d’inéligibilité pour jouer du à son transfert (lors de laquelle Louisville battra… #4 Florida au Sugar Bowl), Christian s’impose comme numéro un à son poste en 2013. Cette année (première en AAC) est grandiose pour le programme qui termine 18ème au Top 25 de saison et bat Miami au Citrus Bowl en concluant avec un bilan de 12 victoires pour 1 défaite. Le joueur cumule alors 426 yards et 4 TDs. L’année suivante, Louisville se retrouve en ACC et le niveau se relève. L’année reste bonne (9-4 et 24ème au Top 25), malgré une défaite au Belk Bowl face à #13 Georgia. Christian garde son rôle et réceptionne 384 yards pour 5 TDs, ce qui lui vaudra de terminer dans la 3rd Team All-ACC. 

Direction donc la Draft 2015, où le TE est sélectionné en dernier choix par les Arizona Cardinals en étant présenté par…Chandler Harnish, coéquipier et Mr. Irrelevant 2012! Lors du dernier match de pré-saison, le joueur se blesse gravement à un ligament, ce qui l’emmène directement en injured reserve jusqu’au terme de la saison. Coupé au cut final de 2016, Christian trouve refuge dans la practice squad des Buffalo Bills. Participant à seulement 3 matchs, il réceptionne une fois le ballon pour 14 yards face aux Oakland Raiders. Il est de nouveau coupé au mois de mars, et rejoint les Cardinals pour un deuxième essai lors de la pré-saison estivale. Malheureusement, ces derniers ne le conservent pas, ce qui met un terme définitif à sa carrière NFL. Gerald Christian persévère tout de même et rejoint par la suite les Arizona Hotshots, équipe de l’Alliance of American Football. En 8 matchs, il réceptionne 14 ballons pour 158 yards et 1 TD. Cependant, la ligue cesse ses opérations avant la fin de la saison.

L’ancien TE reste plutôt discret actuellement. Il n’hésite pas à soutenir son ancien lycée William T. Dwyer HS sur les réseaux sociaux, et semble passionné par l’UFC et les sports de combat. 

2016: CB Kalan Reed

Originaire de Dallas (Texas), Kalan Reed grandit du côté de Birmingham (Alabama). Joueur 2 étoiles et 120ème meilleur CB de la génération lycéenne 2012, le joueur récupère cinq offres dont Memphis, Arkansas State, et Southern Miss. Optant pour ce dernier, le joueur est rapidement propulsé titulaire dès sa saison freshman, dans une équipe en difficulté. Mais le vent tourne peu à peu sous la houlette du nouvel HC Todd Monken (actuel OC des Baltimore Ravens, et OC de Georgia lors des deux derniers titres nationaux). Après une saison 2015 avec un bilan de 9-5, l’équipe de Conference-USA et emmenée par Nick Mullens (QB dans de nombreuses équipes NFL) termine sa saison par une défaite face à Washington, au très réputé Cotton Bowl. Kalan Reed termine sa carrière universitaire avec 152 placages, 3 fumbles forcés, et 8 interceptions dont 3 pick-6. 

Malgré son petit gabarit (1.81m, 87 kg), les Tennessee Titans tentent le pari en dernier choix de la Draft 2016. Il signe alors un contrat de 4 ans pour 2.39M$. Après une première partie de saison en practice squad, Reed est appelé dans le roster principal. Il joue deux matchs pour 3 placages lors de sa première année, puis un match pour 1 passe défendue lors de sa seconde saison. Malheureusement, à l’image des joueurs cités plus haut, le CB se blesse en se cassant le pied. Il est coupé une semaine plus tard, en août 2018.  Les Seattle Seahawks lui offrent une nouvelle chance pour la saison 2018, en lui proposant de rejoindre leur practice squad. Il est par la suite appelé dans le roster principal mais sans apparition en match. Après une grave blessure au cou synonyme de fin de carrière, Reed est définitivement agent libre à partir de 2020. 

Désormais père depuis bientôt trois ans, l’ex joueur de 29 ans semble jouir d’une vie de famille comblée avec sa femme.

2017: QB Chad Kelly

Peut-être le joueur le plus controversé de cette liste. Rien qu’en rédigeant cet article, je ne sais par où commencer. Originaire de Buffalo (New York), le nom de famille du joueur de 29 ans semble peu original, mais est pourtant lié à un acteur majeur du football américain des années 80. En effet, Chad est le neveu du grand Jim, ancien QB légendaire des Houston Gamblers et Buffalo Bills (qui ont même retiré son numéro). Le jeune QB avec un bras phénoménal et un potentiel athlétique énorme a alors tout pour plaire et suivre le destin de son oncle. Tout, sauf un caractère stable. Dès le lycée, Chad est exclu (pour des raisons inconnues) et doit trouver un nouvel établissement pour jouer. Il tombe alors du côté de la célèbre et prestigieuse St. Joseph School, où il lance plus de 5200 yards pour 51 TDs, et coure pour plus de 2000 yards et 29 TDs, lors de ses deux dernières saisons. Vu comme un 4 étoiles, et le 5ème meilleur QB double menaces de la cuvée lycéenne 2012, Kelly décide d’emmener son talent du côté de Clemson, sous les ordres de Dabo Sweeney. Après une année redshirt sur le banc, il se retrouve impliqué dans 5 matchs en 2013, lui valant 58 yards à la passe, et 1 TD à la course. Suite au départ du QB titulaire Tajh Boyd, Kelly se retrouve en compétition avec deux autres coéquipiers (dont Deshaun Watson) pour le poste de titulaire l’année suivante. Malheureusement, le caractère du joueur ressurgit, et Sweeney décide de l’évincer de l’équipe après que le QB se soit manifesté très négativement envers ses coachs, lors de la mi-temps du Spring Game 2014. 

Kelly décide alors de transférer en JUCO, du côté du très célèbre East Mississippi Community College (qui apparaîtra une année plus tard dans la série Netflix “Last Chance U”). En 12 matchs, il lance 3906 yards pour 48 TDs et 8 interceptions. L’équipe remporte le championnat national de JUCO tout en terminant invaincue. La même année, il est arrêté pour une bagarre en boîte de nuit et rébellion contre les forces de l’ordre (ce qui lui vaudra 50 heures de travaux d’intérêt général). 

Ayant des offres d’Ole Miss, Indiana, et Virginia Tech, le QB décide de rejoindre la SEC. Du côté du Mississippi, Kelly succède à Bo Wallace au poste de titulaire pour la saison 2015. Résultat? Les Rebels terminent 10ème du Top 25, avec un bilan de 10-3, dont une victoire au Sugar Bowl face à #16 Oklahoma State. De son côté, le QB cumule 4000 yards, 31 TDs pour 13 interceptions, et 500 yards à la course pour 10 TDs. Il est sélectionné en 1st Team All-SEC. Ses coéquipiers Laquon Treadwell et Evan Engram se rappellent bien de cette saison. L’année suivante est beaucoup plus compliquée, avec une équipe terminant sur un bilan négatif (5-7). Kelly termine la saison à 2800 yards, 19 TDs pour 8 interceptions, et 330 yards pour 5 TDs à la course. C’est à ce même moment qu’une longue enquête de la NCAA met en lumière de graves violations de la part du Head Coach Hugh Freeze et du programme (argent et biens matériels offerts aux joueurs, recrutement, service de prostitution etc), ce qui mène à de très lourdes sanctions. 

Parallèlement, Chad Kelly s’envole vers la Draft 2017. Le QB, pourtant prometteur, attend son nom tout au long du troisième jour, ce qui nous offre ce moment incroyable: on le voit s’endormir sur son canapé avec un plaid, en compagnie de sa famille, et en direct sur les chaînes qui retransmettent l’événement.  Finalement, les Denver Broncos prennent le pari lors du dernier pick. Après une opération du poignet l’écartant des terrains pour sa première saison, Kelly saisit sa chance en 2018 pour passer second QB derrière Case Keenum. Sa seule apparition sur un terrain NFL advient en Week 6 pour poser un genou à terre. 

La suite? “Mr. Frasques” retombe dans ses mauvais travers lors d’une soirée Halloween organisée chez Von Miller. Après les festivités, saoul il rentre en pleine nuit chez des inconnus. Rapidement arrêté (ce qui nous vaudra un des mugshots de joueur les plus caricaturaux), il est coupé par les Broncos. En mai 2019, les Colts lui donnent une chance, malgré deux matchs de suspension infligés par la NFL suite à l’incident cité. Malheureusement, le joueur enchaîne les allers retours en practice squad, avant de définitivement quitter l’équipe en septembre 2020. Début 2022, le QB controversé rejoint les Toronto Argonauts et la Canadian Football League, terre de joueurs souhaitant se racheter (coucou Johnny Football). Backup pour la majorité de la saison, Magic Kelly rentre lors du 4ème quart-temps de la Grey Cup (équivalent canadien du Super Bowl) pour remplacer le titulaire blessé, alors que son équipe est menée 23 à 17. Après un excellent drive de sa part, son équipe remporte le match 24-23, faisant de lui un champion national. 

Mr. Irrelevant 2017 semble actuellement continuer de s’entraîner dur pour poursuivre une carrière footballistique probablement du côté de Toronto. Il aurait également reçu des offres pour jouer au… lacrosse. Sacré Chad!

2018: WR Trey Quinn

Un petit gabarit (1.83m) avec un look aux antipodes de celui d’un WR? C’est bien lui, Trey Quinn! Le natif de Lake Charles en Louisiane a pourtant été le WR le plus prolifique de l’Histoire du football lycéen avec 6566 yards pour 70 TDs! Malgré ces statistiques inégalées, le physique frêle du joueur le rattrape, et il n’est “seulement” considéré que comme un 4 étoiles, et le 11ème meilleur WR de la classe lycéenne 2014. C’est tout naturellement qu’il décide alors de rejoindre LSU. Après deux premières années universitaires où il participe à tous les matchs (sans pour autant être titulaire), ses années lycéennes semblent derrière lui. Quinn ne réceptionne que 22 passes pour 276 yards chez les Tigers.

Direction donc le portail des transferts, et une année sur le banc en tant que redshirt du côté de SMU dans la banlieue de Dallas. Éligible pour la saison 2017 en tant que redshirt Junior, Quinn s’offre une belle année avec 1236 yards en 114 réceptions, pour 13 TDs. Pas facile quand les deux autres WR de l’équipe ne sont autre que Courtland Sutton (Denver Broncos) et James Proche (Baltimore Ravens). Le WR prend alors l’option de ne pas jouer son année Senior et de s’orienter vers la Draft.

Sélectionné en tout dernier choix par les Washington Commanders, Quinn suit le destin de la plupart des joueurs cités lors du premier article: l’injured reserve dès le premier match de saison. Une blessure à la cheville va en effet le tenir éloigné des terrains la majorité de sa première année professionnelle. Il termine 2018 avec 75 yards et 1 TD à la réception. Pour 2019, le WR est présent à quasiment chaque match et réussit même à inscrire 1 TD en week 1. Malheureusement le reste du temps, il apparaît peu et ne réceptionne en tout que 198 yards, pour ensuite terminer la saison sur l’injured reserve à cause d’une commotion. Washington finit donc par s’en séparer début 2020. Il passe alors une saison en practice squad chez les Jacksonville Jaguars, avant d’être coupé à la suite d’une nouvelle blessure, puis les camps d’été 2021 et 2022 chez les Las Vegas Raiders, puis les Denver Broncos. 

Sa dernière solution? Il signe du côté des Michigan Panthers en United States Football League (USFL). La saison débutant mi-avril, vous pourrez donc suivre les performances de Trey!

2019: TE Caleb Wilson

Et oui, encore un TE en Mr. Irrelevant. Il s’agit cette fois-ci de Caleb Wilson qui perpétue la tradition. Le fils de Chris Wilson (ancien joueur, et célèbre coach défensif en CFB ayant entraîné dans de nombreux programmes) était initialement QB au lycée. Classé seulement comme un 3 étoiles et 82ème à sa position, le joueur évoluant en Californie commit alors à Old Dominion, de l’autre côté du pays, en Virginie. Mais son père étant DL coach à USC, Wilson rejoint finalement les Trojans en tant que walk-on et change de poste passant TE. Problème, le lien familial est rapidement rompu lorsque le programme californien licencie son géniteur. Caleb décide alors immédiatement de transférer chez le voisin UCLA.

S’imposant rapidement comme un titulaire indiscutable, Wilson passe trois saisons solides du côté du Rose Bowl (dont deux avec Josh Rosen), et effectue une année 2018 dantesque: 965 yards en 60 réceptions et 4 TDs. Il est le TE le plus prolifique de l’Histoire de UCLA sur une saison, mais également en FBS (sauf en TDs) pour 2018. Cela lui vaut d’être sélectionné en 2nd Team All-American, et 1st Team All-PAC 12.   Wilson décide de ne pas jouer sa saison Senior et part pour la Draft 2019.

Sélectionné en dernier choix par les Arizona Cardinals, il passe sa saison en practice squad. Récupéré l’année suivante par les Philadelphia Eagles, le chemin reste le même malgré quelques apparitions dans le roster principal. Après des passages anecdotiques du côté des practice squads des Washington Commanders et Denver Broncos en 2022, Wilson ne retrouve pas d’équipe.

Le très bon ami de Trae Young (oui) travaille désormais dans le coaching staff de l’université Purdue (Big Ten) en tant que OL/TE coach assistant. Caleb Wilson suivra donc-t-il le destin de son père?

2020: LB Tae Crowder

Le parcours du Mr. Irrelevant 2020 est du genre… irrégulier. Le joueur originaire de Géorgie est d’abord présenté comme WR à la sortie du lycée. Malgré son bas classement (3 étoiles, 221ème à son poste), il obtient une offre de bourse de la grande powerhouse locale, les Georgia Bulldogs. Après une année 2015 à redshirt sur le banc, Crowder alors utilisé comme RB change de position et passe Inside Linebacker. Il se fait remarquer en 2017 avec de beaux flashs en special teams, tandis que son équipe se qualifie pour la fameuse finale nationale perdue contre Alabama. L’année suivante Crowder passe définitivement titulaire aux côtés de Monty Rice (Tennessee Titans) et signe des stats intéressantes pendant près de deux ans, lui valant d’être parmi les finalistes du Butkus Award (prix décerné au meilleur LB de l’année en CFB). Il termine sa carrière à Georgia cumulant 115 plaquages, 10 plaquages pour perte, 5 passes défendues et 1.5 sacks. 

Sélectionné au dernier choix par les New York Giants, Crowder y retrouve son ancien coach de position travaillant désormais pour l’équipe d’East Rutherford. Lors de sa première saison, le LB est quelque peu gêné par des blessures, mais réussit tout de même à se procurer des moments importants, tel qu’un retour de fumble en TD, ou encore un sack sur Russell Wilson. L’année 2021 est encore meilleure. Crowder joue l’intégralité des matchs, devient meilleur plaqueur de son équipe (130 plaquages), et enregistre 2 interceptions (dont une sur Jalen Hurts) et 1 fumble forcé. 2022 est cependant le début des ennuis. Après avoir joué les huit premiers matchs en tant que titulaire, Crowder voit sa place chipée par Jaylon Smith. Finalement coupé en fin de saison, le LB rejoint les Pittsburgh Steelers.

La pré-saison 2023 de Pittsburgh sera l’occasion pour l’ancien Bulldog de prouver qu’il peut être un bon joueur de rotation (voire titulaire) dans un roster qui manque de qualité pour le poste d’ILB. 

2021: LB Grant Stuard

Grant Stuard, c’est l’histoire made in Friday Night Lights. Le LB compact (1m80 pour 104kg) à la longue crinière grandit au Texas. Élevant quasiment seul ses quatre frères et soeurs pendant que sa mère combat ses addictions à la drogue, et son père est en prison, le joueur se dote très tôt d’une grande maturité. Recruté comme un safety 2 étoiles, Stuard décide de rester proche des siens en choisissant de jouer pour les Houston Cougars. Du côté de l’équipe d’AAC, le joueur passe LB. Présent dès son année freshman sur le terrain, Stuard se fait peu à peu une place de titulaire qu’il acquiert définitivement lorsqu’il est Junior en 2019. Après une année à 97 plaquages dont 9.5 pour perte, 4 passes défendues, et 1 sack, il est sélectionné dans la 2nd Team All-AAC. En 2020, le Texan devient capitaine et par ailleurs meilleur plaqueur de l’équipe. Malheureusement, la saison est écourtée à 7 matchs à cause du Covid. Il est alors le meilleur plaqueur par match de la conférence. Stuard décide finalement de ne pas jouer le New Mexico Bowl avec les Cougars pour se préparer en vue de la Draft 2021. 

Les Tampa Bay Buccaneers, vainqueurs du dernier Super Bowl le sélectionnent au dernier choix. Mr. Irrelevant 2021 signe un contrat de rookie de quatre ans, puis participe à tous les matchs de la franchise Floridienne, dont les Playoffs. Il termine alors la saison à 15 plaquages et 1 fumble forcé. À l’aube de la saison 2022, il est échangé chez les Indianapolis Colts avec un 7ème tour de Draft, contre un 6ème tour. Dans l’Indiana, il participe à 15 matchs et cumule 11 plaquages.

Stuard profite pleinement de la vie, entre son métier qu’il affectionne, son récent mariage, et les nombreuses personnes semblant l’apprécier sur les réseaux sociaux. On peut le dire, c’est mérité. 

2022: QB Brock Purdy

Evidemment, le nom le plus célèbre de cette liste. Mais avant de faire autant parler de lui, Purdy a vécu les montagnes russes. Décryptons. Originaire de l’Arizona, Purdy grandit dans une famille de sportifs axée autour du baseball/softball et du football (son petit frère Chubba est QB à Nebraska, après avoir transféré de Florida State). Titulaire en 2015 (ça ne nous rajeunit pas) pour un lycée ouvert récemment, Brock a la charge de mener ce nouveau programme dans une des régions les plus compliquées en football lycéen du pays (avec des rivaux célèbres tel que Chandler High School, ou encore Hamilton HS). Après de grosses performances et un bilan de 27-13 avec son équipe, Purdy est vu comme un des meilleurs joueurs sortant d’Arizona. Il est considéré comme un QB 3 étoiles et le 36ème meilleur du pays pour la cuvée 2018, avec notamment des offres de programmes tels que Alabama, Texas A&M, UCF, ou encore Iowa State.

C’est vers l’équipe de Ames (Iowa) que le QB s’oriente, avec un jeune Head Coach qui commence à être très en vue: Matt Campbell. Dès son année freshman, profitant de la blessure du QB titulaire, Purdy prend les rênes de l’équipe et s’impose comme étant indiscutable à son poste. Il mène les Cyclones à l’Alamo Bowl, où l’équipe s’incline contre Washington State. Terminant la saison à 2250 yards, 16 TDs pour 7 interceptions, et 5 TDs à la course, il obtient le 6ème meilleur passer rating de toute la NCAA (incluant toutes les divisions). Sa saison sophomore en 2019 bat tous les records. Malgré un bilan de 7 victoires pour 6 défaites, Iowa State affronte et s’incline contre Notre Dame au Camping World Bowl. Mais le QB, lui, ne ralentit pas. Avec presque 4000 yards à la passe, 27 TDs pour 9 interceptions, et 8 TDs à la course, il devient le meilleur passeur de la Big 12 lors de la saison, et le 3ème meilleur scoreur de TDs de l’Histoire de la conférence. Tout cela en cassant plusieurs records de sa fac. 

Vu comme un potentiel gros prospect pour la Draft 2021 après son année Junior, le château de carte Purdy s’effondre peu à peu. Malgré des stats correctes en 2020 (2750 yards, 19 TDs pour 9 interceptions, et 5 TDs à la course), une victoire face à Oregon au Fiesta Bowl, et une année record pour le programme (9-3), le jeune QB semble beaucoup moins bon et serein. De plus, le RB Breece Hall (New York Jets) lui fait de plus en plus d’ombre avec ses stats titanesques (1600 yards et 21 TDs à la course) qui lui valent d’être un des meilleurs joueurs du pays et de remporter de nombreux prix. La saison 2021 confirme les inquiétudes de l’année précédente. Purdy sort une fiche moyenne (19 TD pour 8 interceptions malgré 3188 yards à la passe, et seulement 1 TD à la course) et se montre très peu à l’aise dans les gros matchs. Breece Hall continue de briller (avec quasiment les mêmes stats que pour la saison 2020) et semble porter l’équipe, ce qui mène à une saison positive (7-6) et un Bowl, perdu contre Clemson. Purdy sort de sa carrière universitaire avec 32 records dans son programme, et de nombreuses récompenses en conférence, mais qui selon certains détracteurs, est à ce moment, une des plus faibles du Power 5. 

Semblant petit pour la NFL (1.85m), manquant de force dans le bras, ou de qualités athlétiques, et ayant l’air moyen dans les gros matchs, Purdy n’est seulement sélectionné qu’en dernier choix de la Draft 2022 par les San Francisco 49ers. S’en suit l’une des histoires les plus épiques de ces dernières années en NFL. Arrivé comme 3ème QB de l’équipe derrière le jeune Trey Lance (sélectionné en 3ème choix de la Draft 2021, après que San Francisco ait échangé trois 1st round picks pour l’obtenir) et l’éternel Jimmy Garoppolo, Purdy ne semble absolument pas promis à un avenir important dans la grande ligue. Mais dès le deuxième match, Lance se blesse à la cheville pour le reste de la saison. Puis c’est au tour de Garoppolo en décembre (même si Purdy l’avait déjà remplacé au 4ème quart temps en week 13, lançant une interception). En plein match, Purdy le remplace au pied levé et inscrit 2 TDs contre les Dolphins, ce qui fait de lui le premier Mr. Irrelevant à inscrire un TD en saison régulière. Il est par la suite nommé titulaire et devient le premier QB à battre Tom Brady lors d’une première titularisation. Le jeune Brock enchaîne cinq victoires en cinq matchs et devient le seul QB avec Aaron Rodgers à obtenir un passer rating au-dessus de 115 en deux premières titularisations. Il termine la saison régulière avec 1374 yards pour 13 TDs et 4 interceptions. Qualifié en wild card pour les Playoffs, Purdy détruit les rivaux de Seattle avec 3 TDs pour 332 yards. Lors du match suivant face aux Dallas Cowboys, le QB ne marque pas et reste plus discret. S’en suit le match de finale de conférence face aux Philadelphia Eagles, synonyme de drame. Purdy subit rapidement une blessure à l’épaule et est sorti du terrain, mais son remplaçant se blesse à son tour lors du troisième quart temps. Purdy revient à la rescousse et tente deux passes en vain, et ce malgré la douleur. Après cette lourde défaite, le jeune QB apprend son bilan médical: rupture complète du ligament de l’épaule, l’éloignant des terrains jusqu’à au moins la saison prochaine. L’opération effectuée au mois de mars s’est bien passée, et Purdy devrait pouvoir commencer à lancer à partir de l’été 2023. 

Désormais une grande question se pose du côté du staff et des fans de San Francisco: qui doit être titulaire? D’un côté, le jeune Trey Lance, acquis très haut pour très cher et dont on ne connaît pas pleinement le plafond (il faisait partie de ces QBs énigmes de la Draft, avec un potentiel upside énorme). De l’autre, Brock Purdy, le jeune QB peu flashy, très efficace, et ayant prouvé qu’il ne tremblait pas, mais dont on ne connaît pas réellement l’impact de sa blessure. D’un point de vue personnel, et l’ayant vu jouer pendant longtemps à l’université, j’ai toujours perçu Purdy comme un “executioner”. Il connaît très bien le playbook, sait où il doit lancer, et va faire exactement ce que le coach lui demande. Mais lorsqu’il doit aller plus loin ou vraiment improviser, il montre d’énormes limites.

Le futur nous dira si Brock Purdy, “Mr. Irrelevant 2022”, joueur humble, travailleur, et ayant prouvé qu’il pouvait surmonter l’adversité tout au long de sa carrière, aura les faveurs de la grande baie. 

 

La plupart des joueurs présentés dans ces articles se sont éloignés de la grande ligue, mais tous ont encore un rapport d’une manière ou d’une autre au football. Mr. Irrelevant démontre bien que la NFL est une histoire continuelle agrémentée de sursauts, joies, tristesses, à travers les différents dessins de nombreux destins. Mais au final, tous ces joueurs partagent une chose en commun: l’appel de leur nom à la télévision, pour clore l’un des plus grands évènements sportifs américains. 

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